Fiscalité et Bitcoin

Depuis longtemps, de fausses informations sur la fiscalité du Bitcoin circulent sur le net. En effet, plusieurs sources déclarent que celui-ci n’obéit à aucune loi fiscale et que les profits générés par ce dernier ne sont pas imposable. Ceci est totalement faux, il existe plusieurs doctrines qui régissent le cadre légal des transactions et des investissements. Plongée dans l’historique de la fiscalité de Bitcoin.

D’une fiscalité délicate…

L’intérêt de Bercy pour les cryptomonnaies a commencé en 2011, et en 2016, la cour de Justice européenne a reconnu la blockchain en posant une première définition de celle ci. Elle statut alors également que la TVA ne s’applique pas aux bitcoins, et que l’on doit déclarer les bénéfices réalisés en mining/trading au dessus de 305 euros/an.
Jusqu’à l’arrêt du du Conseil d’État du 26 avril 2018, les bénéfices issus de la vente de bitcoins à titre occasionnel étaient imposés comme des bénéfices non commerciaux (BNC) tant qu’ils ne dépassaientt pas plus de 50% de notre revenu annuel (par exemple, si je gagne 15 000 euros par an et que mes revenus liés aux crypto-monnaies sont en dessous de 7500 euros). Ce taux pouvant aller jusqu’à 60,5% pour les plus hauts revenus. Dans le cas échéant le régime choisi était alors celui des Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC).

Aujourd’hui, par décision du Conseil d’État (26 avril 2018), les bitcoins sont considérés comme des biens meubles incorporels et les plus-values de cessions à titre occasionnel bénéficient d’un dégrèvement pour durée de détention de 5% par an à partir de la 3ème année, donc un taux de 0% après 22 ans… Pas d’imposition ni d’obligation déclarative des cessions jusqu’à 5000€ (par cession en principe, mais méfiance, si les montants totaux sont importants et les cessions régulières (se référer à la première partie), le fisc considérera que vous êtes un professionnel et vous serez imposés au titre bien moins avantageux des BIC). Au-delà de 5000€ les plus-values seront imposées au taux de 19% auquel s’ajoutent 17,2% de prélèvements sociaux soit une imposition globale de 36,2%. Pour les gains antérieurs à la décision du Conseil d’Etat (26 avril 2018), les contribuables peuvent choisir le régime des BNC si ça leur est favorable.

L’année dernière il y avait une ambiguïté dans le cas ou on échangeait des cryptos entres elles (bitcoin vers éther par exemple).

En comparant à la situation chez nos voisins européens, on se rend compte que le taux est beaucoup plus répressif en France. En effet, en Allemagne les plus values sont exonérées d’impôt après 1 an de détention puisque la législation du Bitcoin le considère comme une monnaie privée. En Belgique et au Danemark, il n’y a également aucune taxe. La Suède, réticente aux crypto-monnaies, a décidé de taxer professionnels comme particuliers à 30% sur les plus values. Aux Etats-Unis, la fiscalité s’appliquant en partie par État, c’est assez difficile d’estimer un montant de taxe.

…à une clarification peu avantageuse.

L’année 2019 est une année importante pour la fiscalité du bitcoin et autres crypto-monnaies. En effet, cette technologie devient de plus en plus présente et pour certains, mineurs ou traders, c’est devenue une activité rentable. Comme il a été dit précédemment, l’Etat taxait à 36% les bénéfices aux changes à partir d’une plus value de 5000 euros. Néanmoins ce régime ne s’applique qu’aux particuliers et non au mineurs (BNC) ou traders (BIC) à qui s’applique un régime professionnel.

Les principaux changements:

  • Il est clarifié que l’acte générateur de l’impôt est la conversion de cryptomonnaie vers monnaie fiduciaire (euro), même si cette conversion n’est que temporaire (pour se prémunir d’une chute du prix par exemple) et que les euros restent sur l’exchange
  • La définition d’un jeton permet d’appliquer le nouveau régime à tous les cryptos actifs (exceptés aux cryptomonnaiess anonymes puisque la définition d’un token implique l’identification du détenteur du token, qui doit être réalisée de manière directe ou indirecte)
  • L’obligation de déclarer son compte de cryptos sous certaines conditions
  • Il persiste un flou sur l’application du régime (si on transforme nos token chaque jour en euros est ce que c’est considéré comme une activité habituelle ou pas)
  • Simplification du prélèvement : Désormais ce n’est plus le taux 36% mais 30% (flat tax) qui sera appliqué pour les cryptomonnaies et ce à partir d’une plus value annuelle de…305 euros. Cette principale nouveauté est intéressante pour les personnes réalisant de grandes plus values mais risque de repousser les néophytes qui réalisent des plus values inférieures. Il faut également souligner que le calcul de la plus value présente quelques différences avec celui d’actions classiques.

Là encore, cette réforme ne s’appliquera qu’à partir du moment où les bitcoins sont transformés en euros. Si l’on hold sur un cold wallet, il n’y a pas d’obligation de déclarer puisqu’on ne passe pas par un intermédiaire d’échange (Kraken, Coinbase…), nous ne serons pas non plus taxés. En revanche, cela ne dispense pas de déclarer les comptes par lesquels on est passé pour acquérir des bitcoins par exemple (les cryptos proviennent bien de quelque part). Certaines personnes peuvent se tourner en peer to peer (un ami mineur par exemple) pour acquérir des bitcoins mais ce n’est pas le plus pratique…
En ce qui concerne la déclaration des comptes, les comptes sur des exchanges qui ne proposent pas la possibilité de transformer nos bitcoins en monnaie fiduciaire ou service ne seront pas dans l’obligation d’être déclaré.

Mais que risque t’on réellement ?

Que ce soit avec le nouveau régime ou l’ancien, nous sommes dans l’obligation de déclarer notre compte (les wallets ne proposant pas un échange crypto/euro ne sont pas concernés). Encore une fois si l’on est une société (SA, SARL, SNC, SAS) qui possède des cryptomonnaies, nous ne sommes pas concernés par ce nouveau régime il faudra déclarer dans la catégorie des BIC ou BNC. Nous ne sommes néanmoins (pour l’instant) pas obligé de déclarer la quantité de cryptoactifs sur ce compte.

Pour déclarer ce compte (qu’il soit ouvert,clos ou inactif), il faut le déclarer dans la rubrique “compte à l’étranger” du formulaire 3916 ou alors en ligne sur le site du gouvernement réservé à cet effet. La caractéristique cochée sera “de toute nature”. Ce formulaire n’est pas forcément adapté à la déclaration de crypto monnaies ce qui rend certaines parties impossible à remplir (en cas d’erreur/omission, une amende de minimum 15 euros est à prévoir même si en pratique le fisc devrait être indulgent).

Attention ! Les comptes sur des sites proposant l’échange de cryptos (même sur un compte différent) et la possibilité d’acheter des titres financiers ou des valeurs mobilières sont à déclarer. Par exemple si l’on possède un wallet chez eToro et que l’on a que des cryptos, on se doit de le déclarer.

Mais que ce passe t’il si je ne déclare pas ces comptes ?

Sur le site du gouvernement on peut notamment lire :

” Si vous ne déclarez pas un de vos comptes à l’étranger, vous risquez une amende de 1 500 € par compte non déclaré. Si le compte est situé dans un État qui n’a pas conclu avec la France de convention de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, l’amende sera de 10 000 € par compte.”

https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F34342

Le fait que la France a un grand réseau d’Etats ayant conclu une convention pour la lutte contre la fraude permettra le plus souvent d’éviter l’amende capitale, mais (avis aux resquilleurs !) c’est à double tranchant puisqu’on a du coup plus de chance d’être repéré par le fisc. Autre sanction qui s’applique, si l’Etat considère que l’on a pas déclaré par “manquement délibéré” une majoration de 40% s’applique au rappel d’impôts à payer et elle est doublée dans le cas par exemple de manoeuvre frauduleuse ou de dissimulation d’une partie du prix stipulé dans un contrat. Enfin comme il est indiqué sur Impot.gouv :

“Afin de permettre à l’administration de lutter plus efficacement contre la fraude et l’évasion fiscale, les dispositions de l’article L. 169 du LPF prolongent de trois à dix ans le délai de reprise en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt sur les sociétés (4ème alinéa de l’article L.169 du LPF) lorsque les obligations déclaratives prévues à l’article 123 bis du CGI, l’article 209 B du CGI, l’article 1649 A du CGI, l’article 1649 AA du CGI et l’article 1649 AB du CGI n’ont pas été respectées”.

Traduction : L’Etat a un droit de reprise sur vos impôts d’une durée de 10 ans.

En ce qui concerne la plus value, on doit être capable (en cas de contrôle) de détenir un justificatif de la plus value dans un délai d’un mois après la vente de la cryptomonnaies (crypto vers monnaie FIAT).

La fiscalité des cryptomonnaies commence à se simplifier malgré certaines zones d’ombres et sans pour autant être avantageuse pour tout le monde. Si la loi s’applique à la prochaine déclaration d’impôt sur le revenu 2019 en mai 2020, il est recommandé de déclarer simplement l’existence de ses comptes possédants des cryptoactifs afin d’éviter de nombreuses sanctions sévères.

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